Introduction
Depuis
maintenant près de dix ans, la presse internet est passée devant la presse
papier en tant que source d’information tout en restant derrière la télévision.
Pendant cette même période, la presse quotidienne française a beaucoup souffert
de ce nouveau média qui prenait peu à peu sa place dans les habitudes
françaises. De nombreux titres de presse ont disparu et ceux encore existants
ont vu leurs ventes s’effondrer.
Il
a fallu pourtant presque autant d’années à l’industrie journalistique papier
pour s’adapter complètement à ce nouveau support et proposer des contenus
complémentaires via internet. Aujourd’hui, ces mêmes supports de presse ont
reconquis le cœur des français grâce à une présence tentaculaire sur les
nouvelles écrites mais également via les réseaux sociaux, devenus entre temps
un espace indissociable de l’échange d’informations.
Selon
une étude réalisée par CNN, OTX & Pownar en 2010 (The Power of News and Recommandation), près de 43% des échanges
d’informations de type « nouvelles » se faisaient via les réseaux sociaux
contre seulement 30% par mail.
La
présence d’un titre de presse quotidienne sur les réseaux sociaux est donc
devenue indispensable pour sa survie.
Les
nouvelles pratiques journalistiques liées aux réseaux sociaux
L’avènement
de l’internet participatif a forcé les titres de presse à s’adapter. Les
réseaux sociaux et les blogs ont changé la donne. L’information a, en partie, quitté
les mains du journaliste pour parvenir à celles de l’individu lambda.
Cependant,
et avant tout, les réseaux sociaux sont des média de diffusion : via la
plateforme ou via le transfert. Toujours selon l’étude de 2010 de CNN, certains
reportages disponibles sur internet créent un trafic qui - jusqu’à 80% - peut
provenir des réseaux sociaux. Cela s’explique par une règle de psychologie
simple : on a tendance à cliquer plus facilement sur un lien provenant
d’un ami que toute autre source. Et cette même raison pourrait expliquer à elle
seule l’explosion du média social.
Pour
autant, ce n’est pas la seule explication du développement de la presse
quotidienne via les réseaux sociaux :
L’arrivée de la presse
quotidienne sur les réseaux sociaux
Suite
aux chutes vertigineuses des ventes des versions papiers, les titres de presse
quotidienne française ont décidé d’aller chercher le public là où il se
trouvait : sur internet, et plus précisément sur les différents réseaux
sociaux.
Facebook
est notamment la 1ère source d’information pour 9% des 18-34 ans et est en
général, bien devant la presse papier puisque plus de 30% d’entre eux (contre
22% pour la presse papier) utilise Facebook comme source d’information selon
Médiamétrie.
Les
réseaux sociaux ont l’avantage de constituer un contact direct et diffusent
l’actualité quasiment en temps réel. Si les titres de presse ont accepté de
perdre le contrôle de la diffusion que constituait le papier, cela a été
effectué dans le but d’acquérir un autre type d’informations : volume,
heure de publication la plus efficace, cible touchée, géolocalisation, profil
du lecteur…
Il
faut également savoir que les derniers algorithmes de SEO (search engine optimization) prennent de plus en plus en compte le
SMO (social media optimization) :
être présent sur les réseaux est donc une question de survie.
Les changements de la
sphère journalistique
Les
transformations de la presse papier ne se sont pas limitées à une translation
partielle de support. Elles se sont prolongées bien plus loin, pour transformer
le métier même du journaliste.
Comme
nous l’avons dit plus haut, l’information a en partie changé de main et n’importe
qui peut s’improviser pseudo-journaliste d’un jour à condition d’avoir
l’information qui fera l’exclusivité. Mais surtout, le titre ne devient plus
média à lui seul : il devient source. Chacun de ses journalistes
devient média, chaque individu qui ouvre un blog sur ce titre devient média,
chaque personne utilisant, partageant, un article sur les réseaux sociaux
devient média.
C’est
dans la conscience de ces nouveaux modes de consommation journalistiques que
les professionnels du secteur se sont adaptés. Par exemple, c’est lors du
printemps arabe que le principe du « live-tweet » s’est
développé : les informations contrôlées par les média à la solde des
pouvoirs locaux ne suffisaient plus et la diffusion d’informations a été
reprise par la population. C’est le principe du web participatif qui prend
place dans le monde de la presse.
Ce
principe de « crowd newsing » est devenu courant et encouragé comme
le montre le système de BFM : http://temoins.bfmtv.com/. C’est également ce qu’ont entrepris certains sites
comme Agoravox ou dans une moindre mesure Rue89, MediaPart ou Atlantico depuis
2005 en offrant la possibilité à « n’importe qui » (avec un certain
contrôle) de devenir rédacteur bénévole.
Ces
titres « pure-player » qui n’existent que sur internet (Rue89 dispose
maintenant d’une version papier mensuelle) ont pris une importance telle que le
plus gros représentant de ces derniers : Rue89, a été racheté par le
NouvelObs fin 2011.
Sans
offrir la même possibilité, certains titres de presse ont ouvert des
« blogs » qui ont été « offerts » à quelques personnalités
considérées comme influentes dans leur domaine et qui sont rémunérées pour
fournir un contenu qui n’apparaît pas dans la formule papier mais qui est
toutefois mis en avant sur le site web ou via les applications mobiles.
Maintenant
que nous avons jeté un coup d’œil aux nouvelles pratiques journalistiques,
regardons un peu la présence des divers quotidiens français sur les réseaux
sociaux « classiques » : Facebook et Twitter.
Facebook :
Un espace de diffusion
Comme nous l’avons vu plus haut,
Facebook est, pour une certaine tranche de la population une source évidente –
voire principale – d’information. Facebook représentait en 2010, 14% des
échanges de news via internet.
Selon
Journalismes Info, pour le cas du
site du « Monde », les visites issues de Facebook ont été multipliées
par 5 entre février 2010 et février 2011 pour atteindre 2.5% de l’audience
totale du site web (contre 18% pour les moteurs de recherche). Cette augmentation
se retrouve partout en Europe puisque sur les cinq premiers journaux européens,
7.4% des visites provenaient (en 2011) de Facebook (contre 1.5% pour les
journaux français à la même période).
Regardons
quels sont les titres de presse les plus présents sur Facebook selon leur
nombre de fans :
Sur
le Top 10 des fournisseurs de news quotidiennes, nous retrouvons cinq titres de
PQN (Presse Quotidienne Nationale) - dont un gratuit -, un titre de PQR (PQ
Régionale), trois Pure-Players, et une agence de presse.
On
observe surtout que Facebook est un domaine où dominent trois titres de PQN :
[Le Parisien – Aujourd’hui en France] ; Le Monde et Le Figaro. Pourtant,
en volume de tirages, ces titres ne sont que 5, 6 et 7ème derrière
notamment les quotidiens gratuits ou Ouest France. Ils dépassent tous les
500.000 fans quand 20 Minutes en dénombre un peu plus de 160.000.
Pour
autant, le contenu des diverses pages Facebook ne diverge que peu : les
infos abordées restent relativement identiques d’un titre à l’autre et le
community management sur ces pages ne se contente que de relayer les articles
publiés sur les sites. Il semblerait donc que les « fans » utilisent plus
le support comme une sorte de flux RSS d’informations, afin d’avoir une instantanéité
sur les nouvelles.
Du
côté du taux d’engagement, les titres de journaux se portent plutôt bien avec
des taux logarithmiques qui vont de 65 à 90% : commenter l’actualité
semble être une chose naturelle pour bon nombre de fans ; quitte, parfois,
à laisser à tout jamais l’empreinte de ses avis politisés sur une page publique,
ouverte à tous…
Twitter :
Le direct en direct
Twitter
a été le premier vrai refuge social des journalistes. Son côté instantané et
son format court, ont permis aux journalistes d’y trouver un moyen simple de
communiquer des informations qui ne méritaient pas un article entier ou qu’ils
pouvaient simplement compléter ou partager sans avoir à les formuler en 1.500
caractères (format usuel d’un article).
Certains
journalistes sont même devenus très influents sur la Twittosphère : les
plus suivis : Jean-Jacques Bourdin de la radio RMC ou Christophe Barbier
de l’Express
rassemblent
plus de 200.000 followers. A titre comparatif, s’ils avaient été inclus dans le
graphique ci-après, ils auraient trusté la 9ème et 10ème
place.
Les
titres de presse, tout comme les journalistes se sont également emparés très
rapidement du réseau social de micro-blogging et, pour de nombreux titres de
presse, Twitter est même devenu plus important que Facebook : plus de la
moitié des titres de presse quotidienne et des pure-players ont plus de
« followers » que de « fans ». Le fait que la portée de
Twitter soit supérieure à celle de Facebook est pourtant particulière et
quasiment exclusive au monde de l’information puisque l’on compte cinq fois
plus d’utilisateurs Facebook que de Twittos.
Twitter
devient tellement puissant qu’en 2010, un article du New York Times était
retweeté toutes les 4 secondes.
Jetons
un coup d’œil au top 10 :
Le
Monde avec ses 1.500.000 followers – ce qui en fait le 3ème compte
Twitter français derrière David Guetta (qui tweet en anglais) et Twitter
Français (qui est un conseil d’abonnement à l’inscription) – prend la première
place avec plus de deux fois le nombre de followers de 20 Minutes. Il est
intéressant de voir toute l’importance d’un tel chiffre : le site
LeMonde.fr disposait en août dernier de 6.8 millions de visiteurs uniques, ce
qui signifierait qu’en théorie 22% du trafic unique pourrait provenir de
Twitter. Nous n’énonçons ici que des suppositions bien entendu, puisqu’un
follower ne clique pas forcément sur un lien qui lui est proposé et également car
un follower peut accéder au site par d’autres moyens. Toutefois, cela nous
donne un aperçu de toute la puissance d’un réseau social aussi simple que ne l’est
Twitter.
L’importance
des réseaux sociaux et du mobile dans la diffusion d’un titre de presse :
Nous
avons pu observer les nouvelles pratiques journalistiques qu’ont imposées les
réseaux sociaux puis nous nous sommes arrêtés sur les deux principaux réseaux
sociaux français.
Mais
d’un point de vue « top », cela ne nous offre que des chiffres sans
vraiment les mettre en rapport avec la force du titre de presse vis-à-vis de sa
version papier. Voici donc un top 10 qui répond à l’équation toute
simple : (Fans Facebook + Followers Twitter) / Nombre de tirages papier
(source OJD-Médiamétrie).
Voici
le résultat :
Comme
vous pouvez le voir, seuls cinq titres de presse nationale ont un ratio
supérieur à un. Cela signifie que la presse française notamment régionale reste
en léger retard sur les réseaux sociaux. On pourra toutefois noter que les
Pure-Players ou l’AFP ne peuvent pas être dans ce top vu leur diffusion papier
nulle.
Nous
avons donc complété ces chiffres par un classement qui utilise le nombre de VU
(visiteurs uniques) sur les sites web des titres de presse afin de comparer
leur trafic et leur importance sur les réseaux sociaux en suivant toujours
l’équation basique suivante : 10*(nombre de fans Facebook + nombre de
followers Twitter) / Nombre de VU.
Voici
le résultat :
Dès
lors que l’on se concentre sur internet, les pure-players, dont c’est la
spécialité, explosent nos ratios. On peut évidemment parler du premier : Médiapart
dont l’accès aux articles sur le site est payant ; les réseaux sociaux
sont donc un accès simple à des résumés
de ces mêmes articles. Suivent ensuite Rue89 et Slate qui sont également deux
sites dont la base de fans est – relativement à leur trafic – très élevée.
Pour
les titres de presse classiques le ratio est plus faible car les sites sont
très fréquentés : pour le Figaro.fr, on parle de 9 millions de visiteurs
uniques ! Comparativement, Facebook est à 25 millions, Amazon 13 millions,
Pôle Emploi 6 millions.
Cependant,
ces dernières années, une autre alternative s’est développée : l’internet
mobile, notamment grâce au système d’applications.
Nous
avons récupéré les données des visiteurs uniques issus de ces applications
mobiles et tablettes de différents titres de presse via l’OJD pour les chiffres
d’avril 2013.
Nous
voyons alors que, notamment pour les premiers, la part du web est non
négligeable. Si l’on ne peut pas encore dédupliquer les visiteurs web ET
mobile, nous pouvons toutefois observer que le trafic mobile représente une part
équivalente à 35% (pour Le Monde) du trafic web classique.
Conclusion :
Les
titres de presse quotidienne français ont été relativement réactifs lors de l’arrivée
des réseaux sociaux avec leur marque forte et sont moins « Google
dépendants ». Ils s’y sont installés rapidement et y ont fait leur place.
Pour autant, ces mêmes journaux doivent réussir à trouver le compromis qui leur
permettra de compenser la baisse des abonnements et des ventes papier.
Ce
compromis passera sûrement par les réseaux sociaux comme source de trafic
et par les applications mobiles comme nouveau média.
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Emeric
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